Chirurgie esthétique, faut-il l’avouer?

Chirurgie esthétique : Assumer son nouveau corps!

 

Tous les hommes rêvent de se balader au bras de Charlize Theron. ­Celle de la pub du parfum J’adore de Dior. Un corps de rêve, sensuel, doré, sublime. A quoi ressemblait-elle vraiment à 20 ans ? Et depuis, a-t-elle eu recours à la chirurgie esthétique? A-t-elle fait liposucer ses hanches somptueuses aux courbes d’am­phore ? Ou tout simplement corriger au laser quelques ridules au coin de son regard de braise. Ils s’en fichent. Ou plutôt, ils ne veulent pas le savoir. Toutes les études révèlent que les hommes ne sont pas opposés à la chirurgie esthétique. Ils n’y voient aucun mal tant que cela ne se voit pas.

 

Le problème, c’est que nous, nous n’oublions pas. Notre cerveau garde en mémoire les réflexions sur notre gros nez d’avant et nos complexes, envolés le matin où nous nous sommes, enfin, réveillées avec le profil de Louise Bourgoin. Mais que de combats, d’hésitations, de reculades et d’énergie dépensée avant de se sentir « belle » devant la glace pour la première fois, avec un corps désirable pour un homme ! Le recours au bistouri est une longue histoire. Il met en jeu d’innombrables questions : la construction de l’image de soi mais aussi des sentiments d’usurpation qui, étrangement, s’exacerbent quand un amoureux nous déclare dans un souffle brûlant : « Je n’ai jamais vu une fille aussi canon que toi. »

 

Céline est une droguée de la chirurgie esthétique. A 35 ans, elle s’est déjà fait remonter les seins, raboter le nez, tatouer les sourcils et retirer le gras des genoux, qu’elle jugeait trop gros… Inimaginable à quel point cette fille très douce doute de son charme ! A chaque fois qu’elle se fait opérer, elle y va avec l’espoir fou et sans cesse déçu de s’accepter enfin, d’être aimée par un homme. Elle ferait mieux de s’allonger sur le divan d’un psy, mais c’est sur le billard qu’elle va chercher le bonheur. Sa dernière obsession, ce sont ses yeux. Elle a des prunelles d’un joli marron chaud, et un soir, avant de sortir en boîte, elle se met des lentilles de contact bleues. Sur le brun de ses iris, les lentilles rendent une spectaculaire teinte lavande, tirant sur le violet. « Au bar, un très beau mec me drague toute la soirée, ensor­celé par mes yeux. Il me dit que j’ai les plus beaux du monde, qu’il est déjà en train de tomber amoureux… Je rentre chez moi totalement paniquée. L’homme me plaît, mais comment lui dire qu’il a été attiré par un artifice, que je ne suis pas aussi belle qu’il le croit ? Il m’appelle le lendemain et m’invite à dîner. Je me dis d’abord que je vais y aller sans lentilles, mais j’ai tellement peur de sa déception que je n’ose pas. » Paralysée par un intense sentiment de tromperie mais incapable de prendre le risque d’être rejetée, elle remet ses yeux violets et s’enfonce dans son mensonge : « Je suis attirée par cet homme mais, en même temps, je lui en veux d’aimer chez moi une chose qui n’existe pas. » Elle passe une nuit avec ce nouvel amant, terrorisée à l’idée de perdre ses lentilles dans le feu de l’action. Elle anticipe des situations grotesques, l’homme qui se réveille et qui la trouve à quatre pattes en train de chercher ses petits cercles bleus sous le lit. Elle finit par rompre.

 

Chirurgie esthétique: Révéler sans tarder

 

Pendant des siècles les femmes ont été perçues comme des coquettes, séductrices et trompeuses, appâtant l’homme à coups de faux seins, faux culs, fausses dents, postiches et emplâtres de fard. Aujourd’hui les choses sont beaucoup plus compliquées. L’heure est à la fois au naturel et à la modification profonde. Avec la médecine et la chirurgie esthétique, on se « photoshope » à même la peau, jusque dans la chair. On n’enlève plus ses faux seins, on les porte à l’intérieur de soi. Celles qui ont « fait quelque chose » ont le choix de le dire ou de ne pas le dire et, loin d’être anodin, ce choix peut colorer une rela­tion amoureuse, définir les limites qu’on pose à la vérité et à l’intimité.

 

Ainsi Pauline… Elle a 28 ans lorsqu’elle rencontre David. Il est beau, libre d’esprit, intelligent et ­tendre. C’est un mec qui aime les femmes, qu’on imagine avec un bébé dans les bras. « On se plaît énormément, on se parle jusqu’à l’aube. Mais il y a un truc que je ne lui dis pas, ­parce que j’ai l’intuition que ça ne lui plaira pas : à 20 ans j’étais plate comme une limande, et j’en souffrais énormément. » Motivée par la chirurgie esthétique, un chirurgien lui a fait des seins parfaits, très natu­rels, pas ces ballons de rugby à la « Desperate House­wives » qui pointent outrageusement sous un pull échancré. « Mes beaux seins m’ont changé la vie. » Sauf le soir où elle fait l’amour pour la première fois avec David. « J’ai peur qu’il ne se rende compte de quelque chose. Je me raidis quand il veut me toucher les seins. Pendant le dîner, il m’a parlé avec sarcasme des bimbos siliconées : « Jamais il n’y en aura une dans mon lit », a-t-il affirmé. » Elle n’a rien répondu. « Mais mon silence commence à me hanter. J’ai l’impression qu’entre lui et moi mes seins font barrière. C’est une question de confiance, et la mienne est limitée par la peur de le décevoir, de ne pas correspondre à l’image idéale et nature qu’il a de moi. » Curieusement, au fil des jours sa peur se transforme en colère. Elle éclate, un soir où il lui murmure à quel point il aime caresser ses seins. « Je le traite d’hypocrite, de faux-cul. Il n’aime pas les pétasses sili­conées, eh bien j’en suis une ! Et il ne s’en est même pas rendu compte. Qui est-il pour les juger ces pétasses ! Il est bien content que j’aie de jolis seins, sans savoir à quel point j’ai investi pour les avoir ! Je pleure comme une fontaine. Il me prend dans ses bras, s’excuse, me console. Cette révé­lation tardive nous a rendus encore plus amoureux. Si je n’avais rien dit, ça aurait tout empoisonné… »

 

Chirurgie esthétique: Mentir par omission…

 

Léa, 35 ans, s’est, elle, offert un tout nouveau sourire : « J’ai été sévèrement anorexique pendant des années, et j’ai tout pris dans les dents. Certaines ont même commencé à tomber. C’était horrible. J’ai dépensé des fortunes pour me faire poser des implants. Quand j’ai rencontré l’homme de ma vie, il a tout de suite flashé sur ces dents éclatantes de blancheur et de vitalité. » Dans l’ivresse de cette première soirée, elle sourit de plus belle, sans songer à dire la vérité. « Et ce mensonge par omission m’a vraiment ­gênée. S’il ne m’avait rien dit, ça ne m’aurait posé aucun problème. Mais là, j’avais l’impression de l’avoir trompé sur la marchandise, d’être comme une fausse Rolex. En plus, la bouche, c’est totalement lié à l’érotisme, aux baisers, sans parler du reste… » Incapable de ne pas avouer mais aussi de lui dire la vérité en face, elle se décide à lui écrire une lettre d’explications : « Ces dents que tu aimes tellement… Eh bien elle m’ont coûté le prix d’un studio de 20 m2, et j’ai souffert pour les avoir… » Sa réaction ? « Il était surpris de constater à quel point je m’étais fait une montagne de cette révélation. »

 

Chirurgie esthétique: savoir garder ses secrets !

 

Infirmière, Laura pourrait jouer dans la série américaine « Nip/Tuck ». Un corps de danseuse ­qu’elle entretient par des séances de Pilates. Avec ses amoureux, d’un soir ou d’un mois, elle ne s’embar­rasse jamais de ces secrets prétendument inavouables : « J’avais le gros nez bossu de mon père, et je l’ai fait refaire il y a dix ans. Je trouve que c’est la décision la plus intelligente que j’ai prise dans ma vie. Mon nouveau nez fait complètement partie de moi, j’ai même oublié la tête que j’avais avant. Je n’ai aucun sentiment de mensonge ou d’image trafiquée. Je n’ai jamais éprouvé le besoin de dire à un amoureux que j’étais née avec un gros pif. D’ailleurs, ce sont les filles qui voient que j’ai le nez refait, pas les garçons. Donc je n’en parle pas, sauf si ça vient sur le tapis, quand on regarde des vieilles photos de famille par exemple. Mon mec actuel m’adore, et ça ne me vient pas à l’esprit de me demander s’il m’aurait aimée avec mon ancien nez. Je n’ai été confrontée qu’une seule fois à une réaction totalement délirante : un type croisé dans un club de gym, très beau et narcissique, qui passait des heures à se gonfler en se regardant dans la glace. On avait vaguement copiné, jusqu’à ce qu’il me dise qu’il ne ferait jamais un enfantavec une nana au nez refait, par peur qu’elle ne transmette le gène du vilain pif à sa descendance. Je l’ai traité de sombre connard pathétique et je ne lui ai plus jamais adressé la parole. »

 

Confession ou non… cette question existentielle se pose de façon plus subtile encore lorsqu’on vit en couple et qu’on partage depuis des années l’intimité d’un même homme. Impossible de modifier une image imprimée dans le regard du compagnon en prétendant être toujours la même. Diffi­cile de s’absenter quelques jours et de revenir à la maison avec un bonnet 95 D, un plâtre sur le nez ou des yeux de boxeur en lançant juste : « Chéri, ce soir, on se ferait pas un restau japonais ? »

 

C’est donc uniquement sur des interventions mineures, pratiquées en médecine esthétique, que se joue le choix ­entre transparence et silence. Pour Marina, 48 ans, tous les artifices qu’elle utilise ne regardent qu’elle, et surtout pas son mari. « Dès que j’ai commencé à avoir des rides, j’ai eu recours à la médecine esthétique. Tous les quatre mois envi­ron, je me fais faire du Botox et des injections de Radiesse. Je trouve ça génial. Mais il est hors de question que j’en parle à mon mari. Je ne fais pas ça pour lui mais pour moi. Il est très content que j’aie l’air plutôt jeune, et je ne vais pas lui dire que je dois ça à mon médecin. » Elle a horreur de l’excès d’intimité physique, ne parle pas de « trom­perie », mais juste de préserver ses « secrets de fabrication ». Il y a des limites à la transparence. « Quand je me fais une coloration, j’attends d’être seule. Je ne me balade pas avec de la patouille sur la tête. »

 

Christine, en couple depuis vingt-trois ans, s’indigne de l’hypocrisie qui règne autour du naturel. « On est censée rester fraîche le plus longtemps possible, mais on se moque des actrices botoxées. Il y a, à la fois, une interdiction de vieillir et un jugement moral autour des techniques de rajeu­nissement. Je me fais faire des injections depuis des années, et je le garde pour moi. Au cours d’une séance, ma dermato a proposé de m’en faire dans les lèvres. En sortant, je n’avais pas une tronche de mérou mais, quand même, la bouche beaucoup plus large que d’habitude. J’ai rentré les lèvres pendant deux mois, pour ne pas que ça se voit ! »

 

Nadège, la cinquantaine, mariée à un homme un peu plus jeune qu’elle, avoue tout simplement qu’elle ne sait pas mentir. « Ça n’est pas une question de vertu, c’est juste que je ne maîtrise pas la technique du mensonge. La première fois que j’ai fait des injections, je suis rentrée à la maison avec des bleus sur la figure. Mon mari m’a demandé ce que j’avais, et je le lui ai expliqué. J’ai des amies qui racontent des trucs médicaux, qu’elles se sont fait enlever des kystes ou de la couperose. Moi ça ne me vient pas à l’esprit. » Son « jeune » mari s’en fiche complètement. « Il me dit : « C’est ta tête, tu en fais ce que tu veux. » » D’ailleurs, s’il lui disait qu’elle n’en a pas besoin, elle le ferait quand même. Et s’il la poussait à le faire ? « Je crois que je le quitterais sur le champ ! »

 

Alors, « comment le dire ? », « faut-il le dire ? », il n’y a évidemment pas de mode d’emploi. Entre Céline, dévorée par l’inquiétude, et les exhibitionnistes qui se font opérer en direct dans les émissions de téléréalité, toutes les attitudes sont possibles. Si on est en accord avec son image, si on n’est pas obsédée par la peur d’être rejetée, silence comme transparence sont légitimes. C’est à soi-même qu’on doit la vérité.

Source Article from http://www.marieclaire.fr/,chirurgie-esthetique-faut-il-l-avouer,20123,50832.asp
Source : Marie Claire : Beauté

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