Dans la salle de consultation, Lola tripote nerveusement l’oreille de sa peluche. A l’évocation des premières règles, la petite fille se met à glousser. Oui, elle sait ce que c’est, répond-elle au médecin, le rouge aux joues. Sa maman lui en a parlé il y a quelques mois, lorsque des poils sont apparus sous ses aisselles et que sa poitrine a commencé à pousser. Mais à l’école, ses copines l’ont traitée de menteuse quand elle leur a révélé que les grandes saignaient à cet endroit-là. Lola n’a pas insisté et a ravalé son secret. A 7 ans 1/2, elle n’est pas prête à assumer sa différence.
« Elle a son âge dans sa tête mais pas dans son corps. C’est encore une enfant. Il faut la protéger », insiste sa mère, un peu sonnée. C’est en découvrant une boule au sein de Lola qu’elle a décidé de consulter, envisageant le pire. Après plusieurs examens, le verdict est tombé : sa petite fille vit une puberté précoce. Lola se ratatine sur sa chaise. Elle peine à mettre des mots sur ce qu’elle éprouve : « Par moments, je me sens différente de mes copines, mais je n’arrive pas à savoir pourquoi. Je ne comprends pas bien ce qu’il se passe en moi. »
Dans sa classe de CE1, Lola est la seule à avoir un peu de poitrine, qu’elle dissimule sous de larges pulls. « C’est pour ça que je préfère l’hiver », chuchote-t-elle. Du haut de son mètre quarante-deux, elle est aussi la plus grande. Mais si ses règles surviennent dans les six prochains mois, elle n’atteindra pas le mètre cinquante. La puberté précoce accélère en effet la maturation du squelette, mais interrompt aussi la croissance plus tôt. Paradoxalement, ces enfants qui poussent plus vite que les autres deviennent des adultes petits. Pour continuer à grandir, Lola devra subir tous les mois une injection d’hormones qui ralentiront son développement pubertaire. Mais la taille n’est pas le seul enjeu.
Arrachées trop tôt à l’enfance, ces fillettes enfermées dans des corps de femmes se trouvent confrontées à des enjeux et des problématiques qui les dépassent. « Il se crée un décalage complet entre le corps et l’esprit qui peut conduire à un isolement de la petite fille, à une humeur dépressive ou de mauvais résultats à l’école », constate Karinne Gueniche, psychanalyste clinicienne à l’hôpital Necker, à Paris.
Des études anglo-saxonnes vont plus loin, attribuant à cette entrée anticipée dans l’adolescence des troubles du comportement à la fois alimentaires et sexuels, ainsi que des risques d’addiction à des produits stupéfiants. « Mais toutes les petites filles ne sont pas traumatisées ! Certaines ont la maturité suffisante pour bien vivre l’arrivée des premières règles », tempère la docteure Dominique Simon, qui dirige l’hôpital de jour d’endocrinologie pédiatrique à Robert-Debré, à Paris.
Le professeur Charles Sultan, du CHU de Montpellier, se souvient d’une maman paniquée, venue le consulter après que sa fille de 6 ans s’est enfermée dans les toilettes avec un garçon. « Je constate souvent, chez ces gamines en avance sur leur âge et sur leurs copines, un comportement exhibitionniste, sans aucun frein psychologique. Je conseille aux parents de serrer la vis pour éviter des dérapages », confie l’endocrinologue, qui dénonce une omniprésence du sexuel qui encombre l’imaginaire des plus jeunes et déferle sur une génération biberonnée aux concours de mini-miss et aux strings taille enfant.
Notre société voyeuriste est à la fois inquiète et excitée devant ces petites filles femmes
analyse la Dre Gueniche, préoccupée par le phénomène croissant des lolitas.
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Source : Marie Claire : Bien-être